Avril 2024, lors du colloque Ludovia#CH (https://ludovia.ch/), je suis invité à donner une conférence sur le thème large de l’intelligence artificielle (IA) en éducation. J’accepte, car c’est l’occasion de présenter un travail mené avec des collègues des autres institutions romandes de formation à l’enseignement quant à l’acceptation et les projections d’usages des IA génératives des étudiant·e·s et futur·e·s enseignant·e·s.
Le travail présenté est construit sur le TAM (technology acceptance model) qui date des années 80/90 et qui jouit d’une importante assise scientifique. Le lectorat intéressé pourra aller sur la page Wikipédia bien documentée à son sujet (https://fr.wikipedia.org/wiki/Modèle_d’acceptation_de_la_technologie). L’idée est d’étudier les facteurs qui influencent l’acceptation d’une technologie, de son utilité perçue à sa facilité d’usage perçue.
Toutefois, pour des raisons inhérentes à d’autres travaux que nous menons dans l’équipe CRE/ATE et à des échanges lors du colloque, j’interroge notre travail sur le TAM pour proposer qu’il serait constructif de concevoir un “technology-resistance model”.
L’engouement est sans commune mesure. Le temps de questions post-conférence gravite massivement sur quels seraient les constituants de ce modèle. Alors je tente. Je propose ci-dessous une V1 du TeRMo :
Figure 1. Proposition V1 du TeRMo pour participer à la conceptualisation des facteurs influençant la résistance à une technologie
Certes, il ne jouit ni de validité empirique ni de quelconque consensus dans une communauté scientifique. Il ne sert ici que d’initiation à un processus scientifique partagé. J’invite donc la communauté à en discuter et à envisager la confrontation à des réalités empiriques plurielles.
ABE
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Comments
Il serait judicieux de passer de la simple dichotomie “accepter” versus “résister” envers le numérique, plus précisément l’IA, à un modèle plus complexe.
Bonjour Cécile,
Merci de votre contribution. Effectivement, une posture dichotomique ne semble pas adéquate. L’intention ne doit pas être de prescrire l’acceptation ou le refus. Le propos est ici différent (même si l’ambiance générale lors de l’événement était plutôt tournée autour de technologies qui “s’imposent”).
Puisque le modèle TAM permet de comprendre les constituants de l’acceptation des technologies – utiles alors pour savoir où mettre l’énergie pour faciliter leurs diffusions –, ne semble-t-il pas aussi légitime de s’intéresser aux constituants de la résistance aux technologies – possiblement utiles pour savoir où mettre l’énergie pour faciliter le choix–?
bien à vous
Cette présentation et les idées lancées étaient très stimulantes. Merci pour ça Lionel. Deux caractéristiques de la TAM et du TeRMO me semblent problématiques :
Ce modèle enlève la dimension collective ou sociale pour ne se concentrer que sur des dimensions indviduelles. Comme si c’était dans le for intérieur de chacun·e que se définissait entièrement son acceptation ou aversion à un produit technologique.
Cette individuation comme procédé méthodologique est antérieur au TeRMo et à la TAM. Si en sciences sociales (et pédagogiques) on se casse la tête pour assurer un savoir et ses conditions de validité, l’approche individualiste de la TAM et du TeRMo semble apporter un savoir pratique : est-ce que l’implémentation d’une technologie va marcher ? On reste dans la production d’un savoir, savoir orienté business qui permet d’assurer l’implémentation d’une technologie et les profits des acteurs économiques concernés. Il me paraît important que le TeRMO vient de là.
Une deuxième crainte que j’ai par rapport à ce nouveau modèle, c’est qu’il reste technocentré. La technique et ses technologies sont passionnantes certes, mais la science nous indique depuis un moment déjà que la technique est éminemment sociale, que le fait social est déterminé actuellement par une économie spécifique (-ment brutale) et que les limites planétaires que l’on tente vainement de cacher aux yeux des consommateur·ices et décisionnaires vont se faire sentir avec le déterminisme d’Uma Thurman dans Kill Bill. Toutes ces dimensions transcendent la perception d’un individu situé ou la somme de données individuelles produites dans une méthodologie individualiste.