La bibliothèque est le lieu du foisonnement du savoir mais aussi celui de sa préservation. Vanessa de Senarclens propose avec La bibliothèque retrouvée une enquête qui vise à retracer la composition mais aussi la dispersion de la bibliothèque de Karl von Bismarck-Osten, partiellement perdue lors de l’invasion, par l’armée rouge, de la Poméranie orientale en 1945. Comment un savoir se construit-il ? Comment se dilue-t-il dans l’histoire ? A travers sa quête, la chercheuse nous confronte à la politique et aux guerres qui ont déchirées cette région ballottée par l’histoire.
Entre l’essai et le récit, La bibliothèque retrouvée n’hésite pas à mêler des éléments bibliographiques et historiques avec des considérations plus personnelles. La narratrice parvient cependant à s’effacer dans un geste d’humilité et se contente de livrer au lectorat une série de faits, de dates et de personnages sans rien inventer, comme elle le précise à la fin de son premier chapitre programmatique.
L’émotion se manifeste alors que nous suivons cette bibliothèque dès sa naissance au dix-huitième siècle jusqu’à sa dispersion au vingtième. Le texte devient alors la biographie et la bibliographie d’un objet-lieu, véritable témoin de tout ce que ces siècles ont eu d’admirable mais aussi de détestable. Si l’on regrette parfois une trop grande richesse d’éléments qui risque de noyer les épisodes les plus marquants de cette épopée livresque, Vanessa de Senarclens livre cependant un texte riche en émotions qui ne manque pas de nous interroger sur cette période historiquement tendue qui est la nôtre.
Vanessa de Senarclens, La bibliothèque retrouvée, Genève, Zoé, 256 pages, 27,50 CHF.