Folie collective

Les catastrophes environnementales font parler d’elles dans tous les médias du monde, ces catastrophes dues à l’être humain pour lesquelles on ose encore se poser la question : qui en est responsable ? Le siècle précédent a pourtant adulé les progrès technologiques en leur attribuant le pouvoir de former, cultiver, éduquer, simplifier et guérir, ce siècle qui se voulait Absolument moderne, mais à quel prix ?

L’écriture épurée de Jérôme Meizoz te permet, à toi lecteur, de prendre conscience de l’impact néfaste de la modernité sur ton monde : une fois arrivé à la fin de cette œuvre, tu lâcheras ton téléphone portable et tu iras militer pour la cause environnementale (ou du moins tu réfléchiras au monde dans lequel tu évolues tous les jours).

 

J’ai eu honte de notre naïveté, de notre ignorance. Et j’ai aimé ce progrès, de tout mon cœur de gosse, sans en connaître le contenu. Plus tard m’est apparu sa face destructrice.

 

À travers treize chroniques situées dans Les Trente Glorieuses, un certain Jérôme Fracasse, double de Jérôme Meizoz, raconte cette période de l’Histoire, conscient de l’ampleur qu’a pu prendre la prospérité industrielle au vingtième siècle et de l’impact qu’elle a eu sur le monde, ou plutôt sur le Valais. Originaire de Riddes, petite commune valaisanne, Meizoz revient sur les lieux de son enfance, entre les années 70 et 80, pour nous dépeindre l’avènement de la modernité et exposer l’amour que son père éprouvait pour l’avancée des sciences et le prestige éphémère des technologies.

Absolument modernes ! mêle la narration à de doux poèmes et citations, nous fait entendre des slogans criards et dresse les portraits des Anges – en opposition aux treize chroniques – dont celui du cultivateur, de l’ingénieur ou encore du l’ami d’enfance qui symbolisent l’espoir face au siècle : pendant que l’imaginaire moderne avance en détruisant, ils s’efforcent de résister aux excès de la modernité. Une œuvre composite qui symbolise tout à la fois l’espoir et la confusion face au progrès et à la modernité.

 

Père proclamait que la médecine allait guérir sa femme du cancer et pourtant Dieu, sur son nuage, a bel et bien laissé mourir ma mère.

 

La figure de Dieu ne représente plus ce sauveur, guérisseur de maux : Dieu, en congé maladie, n’entendait pas cette musique. La figure divine est présente pour signaler son absence dans le monde. Si Dieu n’avait pas un casque audio sur les oreilles, il aurait pris cinq minutes pour s’intéresser à ce qui se passait en bas. Ce Dieu manquant, ou plutôt absent, qui ne possède aucun message d’espoir à transmettre, pousse les Anges à devenir eux-mêmes les représentants de l’espoir face à la modernité du monde.

Aujourd’hui le monde réclame la suppression des énergies fossiles, proteste contre la déforestation, le monde politique multiplie les sommets environnementaux et Greta devient le visage de la protection environnementale : la charge de Jérôme Meizoz s’inscrit parfaitement dans les idées actuelles que défend la société, sans pour autant tomber dans la démesure. À l’aide d’une écriture sobre, de formules drôles et touchantes à la fois, Absolument modernes mérite l’intérêt de chacun, dont le tien !

 

Une fois que le dernier oiseau aura disparu, que le dernier arbre sera tombé, que la dernière goutte de pétrole sera consumée, on s’apercevra que l’argent ne se mange pas.

 

 

Jérôme Meizoz, Absolument modernes !, éditions Zoé, septembre 2019, 160 p., 24.-

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