Après Saturne ou le goût de l’inabouti

Bastien Roubaty revient cette année en signant son roman Après Saturne, publié aux Presses universitaires de Fribourg. Il s’agit de son deuxième roman à la suite de Caractères (2016), qui n’était pas passé inaperçu au Roman des Romands.

 

 

Vous venez d’être arbitrairement désigné pour faire partie d’un groupe test dans le but d’expérimenter la vie dans l’espace pendant plusieurs années. En cas de refus de votre part, vous seriez considéré comme une menace de type saumon par le gouvernement. Que faites-vous ? Telle est l’épreuve que Bastien Roubaty impose à ses trois protagonistes dans son dernier roman Après Saturne. Et malgré le nombre de désagréments qu’engendre une aussi longue absence, les trois hommes mandatés acceptent, résignés.

Le jeune auteur fribourgeois décrit le quotidien de ces trois cobayes à bord de la navette spatiale Bombyx, de même que celui de leurs proches restés sur Terre. Dans l’espace, la situation dégénère lorsque les astronautes improvisés se retrouvent confrontés à un dilemme éthique à la suite d’un imprévu. Tandis que sur Terre, leurs proches essaient à leur tour de se sortir de situations inopportunes.

Roubaty ne nous conte pas seulement l’aventure de ses trois protagonistes en mission dans l’espace, mais aussi les aventures de trois enfants à charge dont deux délinquants et une fuyarde, les malheurs d’une amante adultère, d’une petite-amie souffrant d’une forme inédite de dysphasie et l’infortune d’un colocataire stressé. Ce n’est donc pas moins de neuf vies que le jeune auteur ambitieux tente de décrire dans son dernier roman. Au vu de la brièveté du roman, les aventures de ces neuf personnages ne sont pas suffisamment exploitées, au regret du lecteur.

Il en va de même pour l’univers futuriste dans lequel s’ancre le roman ; seule une description sommaire en est faite au milieu du roman qui nous apprend que nous nous situons après la présidence de Richard Gisant qui avait décidé d’un système strict excentrant petit à petit la population des centre villes, créant ainsi une échelle sociale et géographique. L’univers d’Après Saturne et ses personnages sont si peu décrits et exploités qu’ils en paraissent superficiels et saugrenus, et qu’ils manquent de crédibilité.

Quant à la forme du texte, les excentricités stylistiques du jeune Fribourgeois et ses jeux de mots loufoques rachètent les faiblesses structurelles de l’intrigue. Il parvient par son écriture concise et imaginative à créer une atmosphère légère qui ne peut que séduire et charmer. Ses descriptions et son univers bigarrés rappellent parfois les décors colorés et créatifs des contes pour enfants, peuplé d’oiseaux-lyres et de colombes-maracas, il suscite une sorte de contemplation et de retour en enfance. Roubaty  innove par des mises en pages inédites et farfelues qui surprennent et ravissent tout à la fois. Aussi, sa plume légère et son monde intérieur méritent qu’on y prête attention. Restons sur nos gardes, nous ne sommes pas à l’abri d’un décollage imminent.

 

Deborah Badoux

 

Bastien Roubaty, Après Saturne, Presses Littéraires de Fribourg, 2019, 229 pages.

 

Image : presses littéraires de Fribourg

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